“BLANC DE POLAK”

Palais de Tokyo,
2021

Commissariat Hugo Vitrani.

«Les ouvriers étalent du blanc d’Espagne dilué à l’eau - sur les vitres, pour
se cacher des regards indiscrets. Cette pratique est caractérisée par des
mouvements énergiques du bras et par l’empreinte des éponges utilisées.
On rencontre ces peintures anonymes dans la ville: certaines sont opaques,
d’autres moins, certains mouvements sont vifs et agressifs tandis que d’autres
exécutés plus lentement produisent des formes douces et presque reposantes.»
Peintre-sculpteur-photographe, Pablo Tomek est d’abord peintre-peintre,
chiffonnier du siècle capitalocène. En 2016, son exposition «Travaux Publics»
envahissait les arches extérieures du Palais de Tokyo, une succession de
peintures monumentales inspirées par les techniques des peintures ouvrières.
L’artiste d’origine Polonaise conclut cette intervention avec un geste pictural
performatif sur les vitres du Palais de Tokyo en chantier, rejouant jusqu’à
saturation les mouvements ouvriers, entre abstraction et (dé)figuration.
Le premier atelier de Pablo Tomek est la rue. Le désordre du dehors était un
terrain de jeux lorsqu’il piratait la ville à coups de peintures illégales.
La comédie urbaine est désormais la matière précaire de l’artiste, dont le travail
d’atelier est imprégné par ses nombreuses dérives où le hasard rencontre des
«détails farfelus et des phases mystiques de la ville». Fonctionnant ensuite par
succession de couches, de ratures, de superpositions et d’effacement, comme
autant de calques numériques, la peinture de Pablo Tomek convoque le langage
corrosif du graffiti, l’héritage de la peinture expressionniste abstraite, tout en
s’inspirant des techniques des peintures ouvrières (blanc d’Espagne, mortier
étalé à la truelle pour condamner les architectures abandonnées, inscriptions
chamaniques tracées en fluo sur le béton, destruction de la peinture au
Kärcher...). Autant de langages inachevés que l’artiste manipule physiquement
pour porter la peinture à l’état pire.